[Texte] Stéphane Rouzé, <em><strong>L'Arche de Moinous</em></strong> (2)

[Texte] Stéphane Rouzé, L’Arche de Moinous (2)

juillet 2, 2009
in Category: créations, UNE
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Voici la deuxième livraison (lire la première) de l’hommage que Stéphane Rouzé a souhaité rendre à son ami Raymond Federman pour ses 81 ans. Avant que ne paraisse chez Léo Scheer, le 6 septembre exactement, le prochain livre de cet incomparable écrivain (Les Carcasses), celui qui a traduit À la queue leu leu et anime le site Lelem nous offre ce "récit qui avance tant bien que mal"…

En fait ce ne sera peut-être pas un voyage — en tous cas ce ne sera pas un voyage vers une quelconque terre promise — ce ne sera pas un bardo todohl de plus — mais plutôt un amoncellement — à l’image de celui qui procède dans les Carcasses — un anecdotique fourre-tout — un bric-à-brac absurde sans queue ni tête — un tas de racontars — des bribes chaotiques extraites de l’univers de Raymond Federman — empruntées plutôt volées — intégrées — désintégrées — digérées — car on ne peut pas vivre avec tout ce bagage F-Virussé sans avoir à le restituer un jour ou l’autre et lui bâtir une arche de triomphe surfictionnelle — alors lecteur — veux-tu que l’on te montre les nombreux trésors que recèle l’Arche de Moinous – receler — receleur – le raconteur de cette histoire est en quelque sorte un receleur ou plutôt un recycleur d’histoire — l’Arche de Moinous est en quelque sorte un grand recyclage fictionnel — ça te tente — Bon alors on y va —

— HERE WE GO — HERE WE GO — HERE WE GO —
— HERE WE GO — HERE WE GO —
— HERE WE GO —

— HERE WE GO ! —

Disons qu’il y a dans l’Arche de Moinous — Moinous first — Charité mal ordonnée commence par Moinous même – Moinous en spécial guest — car tout héros éponyme mérite d’être traité en V.I.P sur l’Arche de Moinous — puis il y a ses ladies — mais nous en parlerons plus tard – en parlerons plus ou moins — Moinous est le premier invité de l’Arche de Moinous — Moinous loneliness qui se confie sous la pluie au pigeon unijambiste de Washington Square — et partage avec lui son quignon de pain dans Moinous et Sucette — oui préfère ici l’anglais loneliness à la française solitude qui ne suffira pas à dire physiquement l’impardonnable solitude — l’impossibilité de dire et l’impossibilité de taire — dont a souffert Moinous à son arrivée en Amer Eldorado — disons qu’il pleut — disons qu’il tombe des cordes — mais la pluie ne motive pas elle seule l’existence de l’arche de Moinous — Ce n’est pas non plus l’histoire d’un échouage — ni l’histoire d’une fuite — mais une arche sur laquelle il sera permis — pour quelques instants de rires-apesanteur — de quitter la réalité derrière laquelle se cache toujours une catastrophe imaginaire — où il sera possible pour quelques instants de quitter cette funeste réalité comme Moinous quitte le fumier-réalité lorsqu’il raconte les fabuleuses aventures de Fantômas à Bigleux le Chien borgne — après avoir tenté de fuir Charlot le taureau furieux de Monflanquin — Moinous gardera en souvenir de ce jour-là une jolie cicatrice au genou gauche– ou encore quand il jump-up à cru Juliette la jument — ah oui on a oublié de mentionner que l’Arche de Moinous est bilingue — ça tient à la nature de Moinous — dont je tente d’inventorier les possessions —

 

 Attention – il ne faut pas confondre l’Arche de Moinous avec l’Arche de Noé — même si l’Arche de Moinous compte parmi ses occupants pas mal de membres du monde animal — pour la plupart sortis directement du Retour au Fumier — et pour cause — car c’est là le Roman de RF le plus agricole — celui qui raconte les tristes années de guerre pendant lesquels RF a trouvé refuge dans une ferme du Lot-et-Garonne – où il a été exploité de l’aube jusqu’au coucher du soleil par ce vieux porc de Fermier — Lauzy — Il n’est bien sûr pas question que Lauzy — le vieux fermier — trouve refuge sur l’Arche de Moinous –oui — ça peut paraître injuste — mais le vieux Lauzy est tricard sur l’Arche de Moinous – car il a trop fait souffrir RF pendant son séjour – il faudrait d’ailleurs penser à établir une liste de personnes interdites de séjour sur l’Arche de Moinous — penser à établir une liste des tricards — ah bon lecteur tu nous trouves sévères avec le vieux fermier Lauzy — car s’il n’avait pu se réfugier à la Ferme RF n’aurait pas échappé à l’impardonnable énormité — bon pour Lauzy on peut toujours s’arranger — et puis il pourrait être utile Lauzy sur l’Arche de Moinous — car il faut bien quelqu’un pour s’occuper des vaches — c’est que Lauzy — ce vieux buveur de piquette — aime bien s’occuper des vaches — surtout de leur cul — mais aussi des poules — parce qu’il y aura des poules et des vaches sur l’Arche de Moinous — et donc du lait et des oeufs — les ingrédients principaux de la crème caramel —

 

La présence d’autres nuisibles pourrait être autorisé sur l’Arche de Moinous — et ce dans le souci de maintenir un semblant d’équilibre écologique — il y aurait même du Fumier dans un coin de l’Arche — le séjour des bibittes à patates — de leur vrai nom les doryphores — serait aussi autorisé sur l’Arche — sauf que ces derniers seraient plutôt malheureux sur l’Arche de Moinous – car les pommes de terre périssables seraient remplacées par les nouilles — oui ne pas oublier les nouilles — qui ont l’avantage de se conserver — oui — the noodles – les nouilles dans tous leurs états comme dans le Roman des Nouilles – il y aurait donc au choix sur l’Arche de Moinous des Macaronis des spaghettis des pennes des coquilles des coudes des torsades des canellonis des manicottis des frisées des spirales – chacun pourra au moment qui lui plaira se taper un plat de pâtes –

 D’une certaine manière on peut dire que l’Arche de Moinous sera autarcique — car il ne sera pas obligatoire de se nourrir sur l’Arche de Moinous – en effet l’Arche de Moinous n’étant pas une fiction alimentaire – les résidents de l’Arche pourront très bien se passer de s’alimenter – se passer de boire – et même se passer de chier – de telle manière qu’il ne sera pas utile de transporter des cargos de potato-tomato ni de PQ sur l’Arche de Moinous – ni de trop grosses réserves de bouffe — nous sommes du coup exemptés des calculs d’apothicaires auquel Namredef a dû se contraindre dans Quitte ou Double pour mesurer les quantités de denrées nécessaires à sa survie auto-sequestré dans sa chambre à Nouillorque pendant 365 jours – on n’aura pas à compter ce coup-ci ce qu’il faut pour tenir de café — ni de sel — ni pour le sucre — ni pour la pâte dentifrice — ni la sauce tomate — ni les brosses à dents — ni le savon — ni le papier (hygiénique ) — ni le papier ( à écrire ) — les histoires qui se racontent sur l’Arche sont orales — ni pour les cigarettes — bien qu’à la réflexion — on aura très envie de fumer sur l’Arche — alors oui les cigarettes — on va donc prévoir tout de même suffisamment de cigarettes de façon à ce que chacun puisse — s’il le souhaite — se taper ses deux paquets de cigarettes par jour — des Luckys et des Caporals — et du Pot — à défaut l’Arche ne pourrait pas planer dans les nuages — on pourrait aussi prévoir juste ce qu’il faut de nouilles et de bouffes pour que les résidents puissent se taper de temps en temps un gueuleton — en solo ou en groupe — puissent de temps en temps se réunir et faire banquet – et fumer — et bouffer — boire et baiser — et pourquoi pas sucer des cailloux —

 

De ce fait — il ne sera pas non plus nécessaire de travailler sur l’Arche de Moinous – le travail ne sera pas obligatoire – juste optionnel — travaillera qui le souhaitera – les résidents de l’Arche auront le loisir de s’ennuyer – ou de faire toutes sortes d’activités s’ils ne veulent pas s’ennuyer – oui un peu comme à un club du troisième âge — cela a peut-être été déjà dit plus haut — mais les résidents pourront tout aussi bien ne rien faire — ou faire chabrot — Prenons par exemple les GI’S de l’Airborne Division – oui les GI’S seront conviés sur l’Arche de Moinous – pourront satisfaire leur obsession du poker et du baisage sur l’Arche de Moinous – mais aussi jouer au baiseball – on veut dire au baseball — mais aussi courir après les rats à longue queue qui cauchemar mordent les oreilles et le nez – oui courir derrière le cul des rats qui cavalaient dur dans la cave rue Rolland à Montrouge – et puis faire des pompes – mais aussi initier les autres résidents de l’Arche de Moinous au plaisir de la pompe — la pompe la pompe toujours recommencée — haut & bas — up & down — et si on se tapait une page de pompes — ça te tente — bon allez — on y va —  [© photo de Dominique Houyet]
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rédaction

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4 comments

  1. Marie Delvigne

    Ok, je monte ! laissez passer les dames en premier Messieurs (sourire) surtout les vieilles dames….
    Je mets le texte sur mon blog Stéphane?
    Bise
    🙂
    PS : si tu publies ce texte « en vrai », il faudra que tu dises que la photo de FED et de Mr Dominique Houyet 🙂

    HERE WE GO !
    YEP YEP….mais je me demande si cet univers « autartique » on va le supporter. Enfin, c’est vrai que L’Arche de Moinous , c’est pas comme dans la vraie vie…hein ! Hum…parce que dans la vraie vie, c’est chacun sa barque et si y’en a un qui se noie ben bof quoi….Ah Fuck, je reviens au réel, so sorry
    Allez on embarque….rêvons, rêvons 🙂

  2. Fabrice Thumerel

    Je n’ai pas tout compris, Marie : c’est quoi une publication « en vrai » ? en version papier ? en volume ?
    Au reste, oui, cette belle photo est de Dominique Houyet.

  3. Fabrice Thumerel

    Péché avoué…
    Allez, Marie, je te laisse encore un an pour « vivre avec ton temps »… (rires)
    = découvrir l’infinie potentialité du multimédia… Explore un peu tout LIBR-CRITIQUE ou
    PUBLIE.NET… et dis-moi ?!

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