[Chronique] L'honneur perdu de Wagner, par Jean-Paul gavard-Perret

[Chronique] L’honneur perdu de Wagner, par Jean-Paul gavard-Perret

mai 31, 2017
in Category: chroniques, Livres reçus, UNE
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[Chronique] L’honneur perdu de Wagner, par Jean-Paul gavard-Perret

Fritz Busch, Une vie de Musicien, Notes de Nuit, Paris, mai 2017, 224 pages, 20 € ; Fritz Busch, L’exil : 1933-1951, présentation de Fabian Gastellier, Notes de Nuit, 300 pages, 20 €.

Mélomane plus que pointue, éditrice engagée et écrivain trop discrète Fabien Gastellier « double » le livre de Fritz Busch d’une biographie aussi précise qu’incisive. Elle suit les années d’exil d’un des plus grands chefs d’orchestre allemand  (et diariste non négligeable) de la première moitié du XXème siècle.

 

Pour écrire la vie de l’exilé, Fabian Gastellier fait siens les mots de Celan : «un œil siffla comme une comète vers/ de l’étroit/ il trouva à dire l’arrachement de l’aveugle». Les mots de la biographe font plonger dans ceux de Busch dont l’œuvre reste inachevée et la vie tronquée.

 

Elle donne voix à  travers les mots du Wagnérien à ce que Celan nomme « die Unfergesenen : à savoir « les inoubliés » qui sont autant le musicien lui-même que les compositeurs qu’il a servis, mais tout ceux aussi qui furent les victimes de la barbarie nazie.

 

Dans ces deux ouvrages, l’histoire personnelle de l’être, celle de la musique comme celle des juifs allemands entrent en nous et nous projettent dans un vertige. La musique devient parfois écluse des deuils, destruction des idoles de la peste brune, la recherche d’un mot clé que l’auteur cherche et qui le cherchait.

 

Sauvé du massacre, Fritz Busch n’en sort pas pour autant indemne. Et se retrouve dans son travail d’artiste comme dans sa vie au cœur de la pensée juive du passage, du Schibboleth que Fabian Gastellier remet à jour.

 

Elle sait que la musique enregistrée et jouée par le chef n’était que l’autre face du silence assourdissant qui le suivait. Sans le dire si ce n’est en filigrane, Fritz Busch a rattaché son travail musical à la mort des juifs de la Shoah. Il a su aussi –  ce qui apparemment pouvait tenir à une gageure, voire un scandale – sauver l’idéal wagnérien au nez et à la barbe de ceux qui s’en servirent comme pare-fumée dans leurs jeux de massacre.

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rédaction

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