[Dossier] De la démo(n)cratie en France... (2/5)

[Dossier] De la démo(n)cratie en France… (2/5)

septembre 3, 2010
in Category: chroniques, UNE
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Voici le deuxième volet, signé par l’écrivain Andy Vérol, dont on gagnera à visiter le site : "France 2010 : l’ère des chemises brunes modernes". Le dessin est du talentueux caricaturiste Joël Heirman (site).

France 2010 : l’ère des chemises brunes modernes

Andy Vérol

Piqûre de rappel : une grosse partie des effectifs de l’UMP est constituée de "patriotes" à tendance "foutez-moi tout ça dehors". Il s’agit de bon sens, mais aussi d’une analyse pointue, la fascisation explicite du message de ce parti est l’officialisation pure et simple de la réalité idéologique des militants de base, mais aussi des élites (pour une grande majorité).

Depuis des mois, plutôt que de traiter frontalement la destruction sociale massive (avec des lois et des mesures qui en ont favorisé l’accélération), le gouvernement, les élus de la majorité et le président de leur République ont clairement posé les marques d’une fascisation accélérée de la société française. L’idée est de canarder à longueur de journée avec des projets de loi qui ne sont pas là pour choquer, mais pour être effectivement votés. L’UMP n’a pas besoin de "draguer" le FN, puisque qu’il est en partie l’une de ses cellules "bon teint"…

Eric Ciotti (UMP) propose un projet de loi qui mettra les parents des délinquants en prison (les gosses seront plus près de maman pour la fête des mères), après le projet de déchoir les délinquants "d’origine étrangère", et la chartérisation des Roms, la chasse aux anarchistes, aux journalistes indépendants, aux libres-penseurs, … la mainmise sur l’ensemble des médias de presse, de télé, ça suffit non?

Il ne s’agit pas de rejet de la démocratie. Le parti communiste américain existe mais il n’a pas autorisation à participer au débat "démocratique" ; de même, l’Iran est une démocratie, mais elle n’autorise pas un certain nombre de partis et de penseurs à participer au débat "démocratique". En Russie, la tendance est la même… La France, depuis une dizaine d’années, s’est installée dans ce schéma qui consiste à dénigrer l’opinion de milliers de personnes, à cadenasser le débat démocratique (ce qu’il est interdit de penser parce que c’est dangereux pour ta sécurité et ton confort citoyen…). Comme je l’écris depuis des années, et je ne suis pas le seul, nous vivons une ère de dictature molle. A savoir que l’on applique des lois fascistes sur une partie minoritaire de la population. Les conséquences sont du même ordre que les lois anti-juives du régime nazi qui, dans un premier temps, consistaient à bannir, à culpabiliser et à accuser les juifs… Les citoyens allemands, embourbés dans la Grande Dépression, en perpétuelle insécurité financière, sociale et idéologique, firent la sourde oreille. La plupart de ces personnes ne voyaient pas de mal à ce que l’on punisse sévèrement les "voleurs", les "délinquants", ceux qui "remettaient en cause les principes de la culture allemande"… La méthode a depuis été appliquée à de nombreuses reprises, en URSS, aux Etats-Unis, en Europe depuis les années 90. La France est un pays qui s’encroûte dans sa dépression économique. Difficile d’admettre, pour quelques vieux citoyens, que l’on ne soit plus qu’une crotte à l’échelle mondiale, que la baguette sous le bras, le litron de pinard et la casquette sur la tête, ne puissent plus être l’uniforme du franchouille moyen.

On a tendance à parler de zones de "non-droits", mais en réalité, les lois votées au nom de la sécurité du français honnête, travailleur et bon "père de famille", ont créé des zones de "non-France".

Géographiquement d’abord, avec les fameuses "cités", montrées du doigt par les médias, élus et quidams possédant le droit de vote. Ces lieux sont maintenant officiellement en voie "d’islamisation" selon les dires du président de leur République. Mais pas que. Ces quartiers sont ceinturés de flics, mis sous surveillance. Véritables espaces abandonnés délibérément, sciemment livrés aux mafias locales, aux petits prêcheurs merdiques et aux populations condamnées à une éducation de seconde zone, à l’interdiction implicite et explicite d’accéder au marché du travail, des loisirs et même de la liberté républicaine inscrite dans la Constitution. Géographiquement mais aussi racialement. Le discours de Sarkozy sur les Roms est un pas de plus vers la racialisation des idées. En prononçant ce discours, il a étatisé les principes de la pyramide des races inspirées en Europe par le comte de Gobineau au XIXème siècle et qui fut une source principale d’inspiration pour l’écriture de la Bible des Nazis : Mein Kampf. Le ministère de l’identité nationale et de l’immigration porte dans son nom les fondements de la hiérarchisation raciale de la société. Il y a l’identité nationale (la France millénaire, la Révolution comme étape fondamentale de la construction d’un Régime bourgeois de souche, …) et l’immigration, c’est-à-dire une partie de la population qui te ferait chuter le PIB de 20% direct si elle n’était pas là, qui est en dessous, inférieure, à surveiller de près.

J’hésite généralement à faire des parallèles avec l’Allemagne hitlérienne… Ces parallèles sont mis à toutes les sauces. Mais avec le "débat" sur l’identité nationale en 2009 qui a ouvert la boîte de Pandore, voici où nous sommes exactement : Allemagne 1934-1935. Il est évident que la plupart des citoyens sclérosés par un manque de culture politique et historique ne voit pas le danger venir. A soutenir ces idées passivement (en grande majorité), ces Français favorisent leur propre déchéance. C’est un peu comme lorsqu’un couple va mal. Plutôt que de se poser, reprendre ses esprits, les partenaires heureux d’une époque, se fritent de plus en plus fort, radicalisent leurs positions et entraînent leur propre chute…

Sarkozy joue sur ce terrain pour des raisons électorales bien sûr, mais aussi parce qu’il est intimement et personnellement un être qui a une vision raciale de la société (son adhésion à la théorie des guerres de civilisations en témoigne), en ce sens qu’il distingue perpétuellement les Français blancs de souche des autres. Son envie de défendre la "discrimination positive", à une certaine époque, allait dans ce sens-là. Il voulait que ceux, inscrits en bas dans la pyramide des bons citoyens, ne soient pas maltraités. Depuis, sa véritable nature a repris corps. Ses pensées, dont il faudrait connaître les origines (familiales, personnelles, culturelles, etc.), sont désormais mises au jour.

S’il était intimement contre ce genre de discours, il ne les prononcerait pas, même pour des raisons électorales…

L’ère des chemises brunes modernes a commencé, il y a quelques années déjà, et, hélas, elle entraînera inexorablement la France dans une atmosphère de guerre civile permanente. Ce président, et ses sbires, sont des amis des grands financiers, mais ils sont aussi des vrais recycleurs (modernité écologique), d’idées nauséabondes…

Je citerais Cioran pour conclure sur cette peste (brune) : "La haine équivaut à un reproche que l’on n’ose se faire à soi, à une intolérance à l’égard de notre idéal incarné dans autrui" (La Tentation d’exister).

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rédaction

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3 comments

  1. Joël Heirman

    Et pour X. Bertrand et N. Morano, c’est la presse, notamment le journal en ligne Mediapart, qui tire ses méthodes des ligues fascistes des années 30… Comprendra qui pourra…

  2. a&dman

    & par-dessus tout ça,
    sarko qui cite jaurès
    juste avant de lui tirer
    une nouvelle balle
    dans la tronche
    ou dans le buffet…
    (drôlement space, tiens!)

  3. Fabrice Thumerel

    Oui, toutes les prises de position de cette nouvelle-droite-décomplexée relèvent d’une rhétorique révolutionnaire-réactionnaire – opération de renversement paradoxale…

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