[Chronique] Louis Dalla Fior, Griefs, par Jean-Paul Gavard-Perret

[Chronique] Louis Dalla Fior, Griefs, par Jean-Paul Gavard-Perret

janvier 14, 2016
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[Chronique] Louis Dalla Fior, Griefs, par Jean-Paul Gavard-Perret

Louis Dalla Fior, Griefs, éditions Tarabuste, 2015, 68 pages, 15 €, ISBN : 978-2-84587-326-1.

 

Griefs  marche par des mystères qui sont ceux d’un poète qui possède la science dans l’effet retard. Il ne cherche pas à provoquer une émotion immédiate mais demande au lecteur une sorte de reprise mentale. Dalla Fior évite cette faiblesse consistant à proposer dans ses œuvres la communication directe qui une fois lue disparaît. Le poète travaille un peu comme un verrier : à partir de formes préétablies et reportées. Mais l’écriture n’inscrit jamais la picturalité de la chose ou du sentiment lui-même.

Se retrouve dans un tel texte  une perception complexe. Dalla Fior est celui qui a décidé une fois pour toute qu’un sentiment aussi complexe que l’amour doit se dire de manière complexe. Une permanence chez Dala Fior : l’idée de repentir chère aux historiens de l’art. Il n’en finit pas de se repentir sans pour autant cultiver la moindre culpabilité.

Le repentir est le travail qui ne cesse de reprendre le texte pour l’affiner, pour aboutir à un achèvement stratégiquement calculé, même si toute fin garde chaque fois quelque chose de déceptif. Mais arrive toujours un point d’équilibre, une limite : « Amarantes au jardin de Séville / bougainvilliers aux murs de Valparaiso /néfliers aux mille collines ou ravines. / C’était un degré d’appartenance complète appartenance – sans le fier Ø – / à l’extremum d’une attention d’une pupille./ Gravir de rudes marches un graduel sous les régimes du vent d’en bas et d’en haut. /Epître l’escalier conduisait droit sur un vide absolu une rareté. … /Enfin enfin en être délivré par l’ampleur d’un nuage-hippocampe parfait ».

Un tel passage montre tout le « swing » d’une écriture affectionnant des tempos qui mettent constamment la langue en déséquilibre. L’artiste tient à cet aspect « déceptif » qui rend le lecteur intelligent. Car celui qui est d’abord déçu par une telle œuvre est obligé de faire un effort envers celle. Il la reconstruit et y trouve même un intérêt du seul fait qu’il y ajoute les constructions « manquantes ».  Preuve que la poésie n’est pas purement contemplative. Elle exige un véritable effort.

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rédaction

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