[Livre-chronique] Xavier Person, Extravague

[Livre-chronique] Xavier Person, Extravague

décembre 11, 2009
in Category: chroniques, Livres reçus, UNE
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Xavier Person, Extravague, Le Bleu du Ciel, automne 2009, 80 pages, 12 €, ISBN : 978-2-915232-63-9.

Tout d’abord, s’impose le trait d’union entre trois auteurs que nous avons abordés récemment : l’admirateur d’Emmanuel Hocquard est aussi celui qui, dans un entretien avec Suzanne Doppelt auquel est emprunté le titre de cette chronique (extrait de l’exergue même), évoque le travail du rêve (métamorphose et hybridation). Par ailleurs, résonne ici le propos que Xavier Person (1962) a tenu en 2008 à Marc Villemain : "Ce n’est pas tant la question de la langue que celle du langage qui m’intéresse. Ce qui se dit quand quelqu’un commence à parler est toujours quelque chose d’étrange, dès lors qu’on y prête attention, c’est une fabrication de nuage ou de brume, une composition flottante."

Prière d’insérer :
"Faisant suite à Propositions d’activités, Xavier Person tente une écriture du rêve. Le livre est centré sur l’importance du couple phrase / rêve. La phrase devient le lieu du rêve bien plus qu’un objet onirique. Les blocs de prose, densifiés, déconstruits, se renvoient les uns aux autres et produisent rapidement une sorte de dramatisation qui tend sans cesse à la légèreté. Une dichotomie qui finit par être l’originalité de cette théorie des vagues."

Chronique : "Les fantômes sont là, partout"

C’est bien à la vague que le poète confie des divagations extralucides en vers ou en prose qui se présentent sous la forme d’un dialogue entre la phrase soliste et le cœur du texte, entre la forme aphoristique et le style métaphorique. Rien d’étonnant à cela quand on connaît le rôle des flots dans les rêves.

Méditant sur le rêve, Xavier Person distingue rêve et rêve de rêve, s’interroge : "Comment ne pas écrire comme dans un rêve, pourquoi dans ma vie ne puis-je pas vivre toutes les vies, et ce carrefour devant moi, pourquoi ?" (p. 45). Sa fascination pour les angles fait écho à Mondrian ou au Leiris de L’Âge d’homme (1939), dont on se rappelle la mémorable phrase : "Les rêves dont on ne parvient pas à se souvenir sont comme des objets dont on ne connaîtrait que les angles"… Avec Mathieu Brosseau – l’auteur de L’Espèce – il partage le "désir d’une poésie qui se déferait du langage, n’en garderait que l’impulsion, pour mieux s’en défaire" (16). On l’aura compris, l’un des intérêts d’Extravague – et non des moindres – réside dans sa traversée du champ artistique contemporain : ajoutons à cette petite liste Duchamp, Roussel, Zukovsky, Creeley, Bonnefoy…

Un autre intérêt majeur tient à la réflexivité : parmi les principes d’une écriture que Xavier Person conçoit comme machine à répétition/variation, la "victoire de l’impersonnel" (35), l’importance de la chute… La page 57 fait même succéder la pratique à la théorie, la juxtaposition des éléments et la définition de l’histoire personnelle comme "suite de moments sans effets" se rapportant à la phrase-titre : "FIN DU MODERNISME, RALENTISSEMENT DU POST-MODERNISME."

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Fabrice Thumerel

Critique et chercheur international spécialisé dans le contemporain (littérature et sciences humaines).

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